Lucy, de Luc Besson

Pourquoi aller voir un film ? Parce que le sujet vous intéresse ou parce que tout le monde en dit du bien ? C’est en fait pour les deux raisons à la fois que j’ai investi hier dans un ticket de cinéma pour visionner le dernier Luc Besson, Lucy.

On ne présente pas le réalisateur, dont la production oscille entre les très réussis Nikita ou Léon, et les délires comme Le 5ème élément. Très critiqué dans son pays, c’est néanmoins l'un des rares français à pouvoir remplir des salles obscures aux Etats-Unis, car il applique sans états d’âme les codes du grand écran américain : des acteurs anglo-saxons connus, beaucoup d’action et d’effets spéciaux, et pas trop de scénario.

Le film se base sur une théorie selon laquelle le cerveau humain n’utilise d’ordinaire que 10% de ses capacités. Tout dépend ce qu’on entend par capacités, mais chez Luc Besson la définition est très, très large.

Nous voici donc à Taipei, capitale de Taiwan. Une organisation mafieuse coréenne cherche à faire passer en fraude en Europe une nouvelle drogue synthétique, le CPH-4. Elle enlève plusieurs personnes et les force à la transporter dans un sac lui-même implanté dans leur bas-ventre, de façon à déjouer les contrôles douaniers.

L’une des mules, Lucy (Scarlett Johansson), est une étudiante américaine de 25 ans. Lors de sa détention, l’un de ses geôliers l’agresse et la frappe, ce qui a pour effet de déchirer son sac abdominal. Le CPH-4 se déverse alors dans son organisme en quantité beaucoup plus grande que chez le junkie moyen.

Mais au lieu d’une overdose, la substance provoque une énorme augmentation des capacités cérébrales de la demoiselle, qui passent – pour commencer – à 25% de son potentiel total. Littéralement transformée, elle devient capable de penser beaucoup plus rapidement, mais aussi manipuler des objets à distance, voir à travers les murs et même prendre le contrôle d’équipements électroniques. Le tout en étant insensible à la douleur. Des dons qui lui permettent d’infliger une sévère correction à ses agresseurs, dont elle épargne toutefois le chef, Monsieur Jang (Choi Min-Sik).

Puis, ne sachant pas quoi faire de ses capacités, elle prend contact avec un chercheur renommé, le professeur Samuel Norman (Morgan Freeman), qui donne à ce moment-là une série de conférences à Paris. Norman lui recommande de partager avec la science toutes les découvertes et le savoir auquel ses nouveaux sens lui donnent accès.

Lucy vient donc en France, où elle dénonce les autres mules à la police et du coup récupère leur précieuse marchandise. Elle décide de se l’injecter en totalité, et espère ainsi utiliser son cerveau au niveau ultime de 100%. Problème : les mafieux l’ont suivie, et ils n’ont pas l’intention de la laisser faire.

Lucy, c’est un peu un mélange de super-héroïne (oups) façon Marvel et d’une action digne de John Woo. Et reconnaissons que dans la première moitié du film, la mixture est particulièrement réussie. D’abord grâce au physique de Scarlett Johansson (si ma femme lit cela, je vais passer un mauvais quart d’heure), filmée avec un rythme qui rappelle un peu Matrix.

Ensuite, grâce aux scènes d’action, et notamment une course-poursuite dans Paris, époustouflante quoique totalement irréaliste. Morgan Freeman, toutefois, n’a qu’un petit rôle, et le dangereux Monsieur Jang n’est autre que Choi Min-Sik, un acteur coréen déjà vu dans l’excellent Old Boy (2003).

Et la science-fiction dans tout cela ? C’est un peu là que le bas blesse. Car outre une hypothèse discutable sur le fonctionnement du cerveau, Luc Besson consacre la deuxième moitié du film à un de ces délires dont il a le secret. Lucy n’a pas seulement des capacités intellectuelles accrues, mais acquiert tellement de super-pouvoirs que la dernière trace de réalisme s’évapore. Elle est ainsi capable de faire à peu près tout, notamment de remonter le temps, d’où une rencontre avec des dinosaures et même l’australopithèque Lucy, une homonyme qui vivait il y a 3 millions d’années.

Les vingt dernières minutes sont carrément hors du sujet, et sans dévoiler l’histoire, précisons qu’elle s’achève brutalement, surprenant le spectateur qui reste sur sa faim. Bref Besson a un peu forcé sur les substances illicites. D’ailleurs, croyez en mon expérience des réseaux informatiques, fonctionner à 100% de CPU n’est pas recommandé !

A noter que la molécule CPH-4 existe réellement, mais a un tout autre usage : elle est créée par la femme enceinte au bout de 6 mois de grossesse pour accélérer le développement du foetus.

Finalement, dans le genre « pilule qui améliore l’intellect », j’ai beaucoup préféré Limitless (2011), tellement plus crédible. Mais il est vrai que rien ne remplace le charme de… OK j’arrête.

Ma note : 3 sur 5